En 1979, André Senik a enregistré un disque, Chants staliniens. Cela fait longtemps que l'ancien responsable de l'Union des étudiants communistes ne croit pas au «socialisme réel», mais il a envie de rigoler un peu. Il chante avec un copain, des amis font le choeur. Dedans, quelques perles, dont ce petit pamphlet de l'après-guerre, contre le président américain de l'époque : «Les Ricains en Amérique/Et la France en République/Coca-Cola ni whisky/La paix, messieurs les Yankees.» Ou encore : «Ecoutez-vous la radio française/C'est radio Truman qui ment/Dans tous ses mensonges, elle se vautre à l'aise/Pour la joie des banques new-yorkaises.» «On voulait montrer jusqu'où allait la connerie du stalinisme, mais comme on a fait ça très sérieusement, ça a même été vendu à la Fête de l'Humanité !» Près de deux décennies plus tard, à l'heure de l'Amérique de George W. Bush et de la guerre en Irak, André Senik ne rigole plus du tout : «Etre antiaméricain, c'est être antilibéral. C'est le même refus de la liberté que le nazisme ou le communisme.» Ni plus ni moins.
Professeur de philosophie à la retraite, André Senik fréquente une chapelle étonnante au coeur de Paris : le temple protestant de l'Oratoire. Dans une salle de l'ancienne église donnée par Napoléon aux réformés, se réunit depuis trois ans un groupe informel d'intellectuels et de journalistes, souvent issus de la gauche, mais partis en guerre contre l'antiaméricanisme. Des neo-cons à la française, ces partisans de la «guerre just